Quand le Maire recompta les voix en faveur du duo « organisateur en chef de la Fête du Cochon, Vache et couvée » de l’année 2022, la victoire était écrasante ! 98 % des votants inscrits (et en âge de l’être) avait élu la paire « Bibi/Quatre ».
Ce duo bancal (au demeurant) avait fait naître chez Lord une éruption de boutons façon varicelle, lui qui ne supportait pas que l’on approchât « son Bibi d’amour qu’elle est la plus merveille créature de la Terre, hormis ma mamounette d’amour à moi qu’elle est trop belle ma môman à moi ».
Bibi avait eu pitié de Quatre qui s’était, encore, pris une veste (Haute Couture) avec la jolie Hollandaise lors du bal du 14 juillet (qui avait vu un Lord étincelant sur la piste, boueuse, de danse aux bras d’une Trois tout en paillette, jupe à volants et charentaise de bal – c’est-à-dire avec des petits papillons en papier crépon, fabrication maison).
Donc, dès le matin du Jour « Cochooooooon » (mot de passe pour l’entrée sur l’aire dédiée à la fiesta), le village comprit que la soirée s’annonçait longue, hilarante et pas sobre.
Bibi avait réceptionné deux grands fûts de la meilleure gnôle du « Gars Gus » (le fournisseur officiel des chasseurs, pêcheurs, et autres spécimens du coin), Quatre avait tâté l’arrière-train des deux cochons de lait et trois « petits sangliers(1) » et les deux avaient, enfin, ordonné au conseil municipal l’épluchage de 50 kilos de « patates pour la robe de chambre » – dixit un Quatre au sommet de son art culinaire.
Dès potron-minet, l’odeur des suidés avait envahi le trou du cul du monde et avait fait défiler tout le village pour surveiller la cuisson (et accessoirement goûter l’eau-de-vie).
A midi, le bourgmestre était arrivé sur le champ de bataille (rapport au tas d’épluchures et de chaises emmêlées) et ordonna de « mettre de l’ordre car on a du beau monde ce soir ».
Le premier adjoint notifia, alors, la présence du Député local qui venait, également, remettre la « banderole officielle du village le plus entreprenant » du département.
Bibi et Quatre rappelèrent Gars Gus pour une nouvelle tournée et rajoutèrent du cognac pour équilibrer les « trous périgourdins entre le cochon, les haricots couenne et le melon au pineau ».
Quelques heures plus tard, le village était en ébullition (et pas uniquement parce que l’alambic avait explosé !). Le Maire demanda à Suprême d’inaugurer la soirée par un discours « plein d’anecdotes hilarantes ». Suprême, au comble de la joie, entreprit de résumer l’historique du village depuis l’antiquité, perdant tous les étrangers au passage, qui ne captaient aucun mot prononcé.
Trois, en mode groupie de base, claquait des mains, encourageant son « Choupinou d’amour sucré », sous le regard affligé de Un et Power qui ne supportaient plus l’hystérie des femmes de la Smala depuis un mois.
Le pompom revint à Deux qui arriva paré d’une robe à motif cochon, un groin sur les fesses ; Jamie-hince-version-onnesaitplusexactementlacouleur portait une jupette écossaise, suivi de près par Cinq-et-Demi tout en costume trois pièces gris perle, version réception à la Buckingham !
Après dix minutes de discours, un hurlement retentit quand un des marcassins abrégea son supplice dans les pommes de terre, créant, donc, un arrêt salvateur aux convives… tout le monde se rua auprès des brasiers pour évaluer la situation (et les dégâts sur le festin).
Ce qui devait arriver, arriva ! Le maire s’empala sur le premier adjoint qui atterrit le nez dans le pourceau, entraînant les broches à terre.
Affolés, les locaux et les british se ruèrent sur le festin étalé sur la pelouse… une petite bataille rangée s’engagea entre les deux camps afin de récupérer les meilleurs morceaux.
Des bouts de cochons volèrent entre les rangs ; si bien que après une intervention de Suprême, cela ressembla à Azincourt inversé à la sauce périgourdine… en raison de trahisons britanniques (la bouffe c’est sacré !), les locaux doublèrent leur nombre et submergèrent les envahisseurs…
Malgré l’appel au calme du premier adjoint (le maire était coincé sous Deux, suite à l’arrachement de son bout de marcassin), une mêlée se forma au milieu du champ qui était réquisitionné pour l’après-fête. A la manœuvre, Cousin Edmond engagea un Haka du tonnerre, sous l’effet cochon/gnôle.
Après dix minutes de baston, une sirène retentit ; la gendarmerie du coin était arrivée sur « la zone sinistrée » suite à l’appel de Trois qui n’arrivait pas à « dégager [mon] marmallow d’amour qui est trognon au réveil avec sa tête de dogue suisse ». Les gendarmes foncèrent dans le tas, chipant quelques morceaux de viande et de patates « pour la troisième mi-temps prévue après la fin des hostilités ».
Au bout de dix minutes, les deux camps opposés se liguèrent contre les forces de l’ordre pendant une longue partie de la nuit.
Aux dernières nouvelles, des morceaux de marcassin volent toujours au-dessus du brasier… par contre, on ne signale plus de pommes de terre braisées…
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- Oui, des marcassins, mais ça traumatise Quatre de le dire ; soyez un peu indulgents, il est bien brave !