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Le mariage de Bibi et Cinq-et-Demi – 1ère partie

Cela faisait vingt minutes que le maire du village trépignait devant la salle des fêtes.

Vingt minutes que tout le conseil municipal patientait en rang d’oignons sous un soleil de plomb et une température qui affichait un « petit 36 ».

Tout le village avait été convié par la Smala et The Family pour assister à l’union « at last » des deux « enfants terribles » : Bibi et Cinq-et-Demi.

Cela faisait, d’ailleurs, les gros titres de la gazette du coin depuis la mi-avril et le curé l’avait annoncée à plusieurs reprises depuis Pâques.

La salle des fêtes avait été décorée du restant des ornements créés pour la Félibrée de 1970, et Pétunia avait commandé tous les hortensias de la contrée. A l’arrivée des fleuristes, la secrétaire de mairie avait tourné de l’œil : 183 pots de fleurs à caser dans un espace restreint par les décorations, tapis rouge, et autres joyeusetés imaginés par Trois, grande organisatrice de l’évènement, en duo (enfin, sur le papier) avec Moms (la mère de Cinq-et-Demi) dite « The Queen Dragon », référence à sa série préférée et sa propension à « allumer verbalement » toute personne s’approchant de ses petits !

Suprême avait, pour l’occasion, écrit un discours validé par Pop’s (papa de) Cinq-et-Demi, lors d’un apéritif qui avait viré à la foire aux vins avec Cousin Edmond au tonneau. Bibi appréhendait tellement cette diatribe qu’elle avait engagé Lord of the Rings pour subtiliser le document, le lire, le corriger, l’amender et le valider… sous prétexte que « Suprême sera trop imbibé au moment M pour se rendre compte qu’il lit un autre texte ».

Quatre, qui était collé aux chaussons de Bibi depuis plus de deux mois, avait été désigné « grand pourvoyeur de musique » afin que la soirée ne soit pas uniquement animée par DJAlfred, le célèbre DJ du coin qui passait au mieux de la Salsa (et pas forcément du démon) au pire de la bourrée ! Il avait donc concocté une « playlist de mariage du tonnerre de pas Brest » – dixit Deux qui avait été « bouleversée par tant de musique romantique ».

Cinq-et-Demi avait sollicité l’inclusion de « quelques titres phares british » avant de s’entendre dire par le comité des fêtes « pas de titres étrangers pendant la saison estivale, ça fait fuir les touristes franchouillards du coin ».

Alors que tout le monde était prêt à la mairie et que The Family avait débarqué pour récupérer Bibi (et la Smala), à l’heure dite, version pingouins en goguette, avec une distinction royale et les queues de pie qui allaient avec, ladite Smala était encore sans-dessus-dessous suite à l’incident de salle de bains qui avait animé le début de matinée.

En effet, Cousine Sidonie, pour gagner du temps, avait pris son bain la veille au soir et avait, de ce fait, fini de vider le chauffe-eau de 300 litres ; erreur subsidiaire, elle avait omis d’enclencher le bouton « marche forcée » et avait plongé la Smala dans un tourbillon glacé dès potron-minet !

Ce fut le cri strident de Tante Dinde qui avait été la plus prompt à regagner la salle de bains à 6h14, qui avait alerté Un qui patientait dans le couloir. Remise du jet glacial, elle avait expliqué la situation à Un qui bouillonnait, Cousin Edmond qui lui tenait la serviette et Pétunia qui était arrivée en nuisette. S’en était suivie une discussion de (bruits) couloir et le hurlement de Trois qui s’était jetée dans les bras d’un Suprême qui n’en demandait pas tant… si bien qu’elle s’était aplatie sur Jolicoeur qui gémissait toujours.

Deux, suivie par son nouveau « boyfriend », le Jamie-hince-version-auburn, s’était mis à pleurer sans avoir compris un traître mot de la situation.

En résumé, trois heures plus tard, à l’arrivée de The Family, aucun membre de la Smala n’était prêt. Bibi patientait dans le grenier entourée de Lord, Quatre et Power, tels des chevaliers de la salle ronde qui défendrait le Graal Bibi jusqu’à l’arrivée des choux à la crème.

The Queen Dragon proposa alors une idée lumineuse : rallier, « suck it and see » la demeure des « british pour un bath »… en moins de temps qu’il en faut pour énoncer la recette du Christmas pudding, la Smala avait mis les paillettes sur les robes et les papillons aux cols.

Lord of the Rings ouvra, ainsi, la marche depuis le parking du cimetière (seul endroit encore accessible après l’envahissement de la population) avec ses souliers vernis et son haut-de-forme assorti.

Suprême fermait la formation tortue franco-irlando-britannique (oui, quelques membres irlandais égarés avaient rejoint les rangs) avec Bibi à son bras qui essayait de maintenir une allure digne malgré la hauteur des talons (12 cm) et le dénivelé de la pente (8%).

A l’approche du troupeau, annoncé à grand renfort de cloches par le diacre, perché dans le clocher, le maire se saisit du mégaphone pour prier ses administrés de « regagner les places du fond, en respectant la numérotation, les travées et les gestes barrières de base… ». Car, suite au 147e reconfinement/déconfinement, le village oscillait entre « le club Ibiza et le couvent » – dixit Cousin Edmond qui était encore sous « chamboulé » de la 83e fermeture « momentanée » du bar-restaurant.

Le maire n’était pas à la fin des surprises quand il aperçut Cousine Sidonie et sa robe à crinoline qui était si large qu’il fut décidé de célébrer le mariage directement sur la place de la mairie, sous peine de devoir « élargir l’entrée principale à coup de bulldozer ! » !

Deux heures plus tard (et autant d’ordres et contre-ordres en deux langues pas toujours bien maîtrisées !), le maire prononça, enfin, les mots magiques qui ouvraient les festivités :

« Mes chers administrés, mes amis, mes camarades, mes copains comme cochon, je vous présente Mister et Madame Cinq-et-Demi-Bibi, oui, ils ont opté pour l’égalité !… »

Un tonnerre d’applaudissements résonna jusqu’au village d’à-côté qui, sous le coup de l’émotion, sonna le glas !

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Épisode suivant : Le mariage de Bibi et Cinq-et-Demi – 2e partie : quand le bal tourne au drame

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