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Trois et Suprême braquent un Intercité

Billets écrits en marge des Aventures, dans le cadre des pré-J.O. Paris 2024 et d’un séjour épique


Trois était sur le quai de la gare, en partance pour un long week-end en amoureux avec son Suprêminou, quand elle hurla. Bibi qui était venue les accompagner (« Faut que tu viennes, sinon ton papounet d’amour à toi qu’il t’aime, va pas vouloir partir » dixit Trois, incompréhensible), la regarda effarée et secoua la tête pour l’enjoindre de se taire…. Tout le quai ayant les yeux braqués sur elles.

« Punaise des bois, Mômanchat, tu vas te calmer… qu’est-ce que t’as à hurler comme ça ? » demanda Bibi.

« Où est mon noyau à la vanille ? » couina Trois.

« Il est au Kiosque pour acheter TON magazine, TA barre chocolatée, TON café » répliqua Bibi les yeux au ciel.

« Il est tellement trognon, mon Suprêminounounounounou » soupira Trois à grand renfort de moulinets de bras.

« Arrête ! Tu vas éborgner quelqu’un ! » ordonna Bibi.

Quelques minutes plus tard, Suprême apparût un grand sac en « coton bio, plus bio tu meurs, vegan, recyclable, bref, un truc de bobo » – dixit Bibi plus tard à Un qui approuva.

« Regarde mon pruneau des îles… j’ai tout pris, et j’ai même eu une peluche des mascottes des J.O » montra Suprême avec fierté. 

« Il est chouuuuuuuuu, hein Bibi d’amour » hurla Trois sous l’oeil hilare des contrôleurs.

Bref, vingt minutes plus tard, Trois et Suprême étaient installés en première, lovés l’un contre l’autre, mangeant du popcorn que Suprême avait rajouté à la liste des courses.

Le contrôleur de la SNCF annonça une « bonne journée, J-1 avant la cérémonie des J.O à Paris », et la destination « la belle d’Aquitaine »…

« Roooh, mon roudoudoudoudou, on va à Bordeaux, la cité de notre premier baiser… C’est roooooomaaaaantiiiiique » cria Trois avant de l’embrasser goulument.

« Doucement ma laie, y’a des gens ici » susurra Suprême tout en essayant de la repousser.

Au bout de vingt minutes, le train s’immobilisa brutalement. Il resta au milieu de nulle part pendant dix minutes de plus avant l’annonce suivante :

« Un parpaing a arraché un caténaire vers Montpellier. Cet acte malveillant nous oblige à rester à l’arrêt pendant un temps indéterminé. Merci de ne pas tenter de descendre sur les rails ».

« Il est con lui ? On va pas descendre dans la pampa ! » soupira Suprême.

« Ils sont gentils les train-train… faut pas dire ça…. » plaida Trois en engouffrant une poignée de pop-corn.

Trente minutes plus tard (selon la SNCF, deux heures selon les passagers) sans nouvelle, le contrôleur expliqua que le train allait « repartir immédiatement ».

« Immédiat…. Ça fait une demi-heure qu’on patiente…. » cria un voyageur qui voulait fumer à tout prix.

Le train s’ébranla, doucement, à la vitesse d’escargot sous tranquillisant… Arrivé à Montpellier, trois heures après le départ, le train stationna sur une voie de garage, à moitié à quai, à moitié dans l’herbe.

« Un incident indépendant de notre volonté nous oblige à attendre un quai libre à Sète… le réseau étant saturé ». 

Suprême qui avait déjà hâte d’être attablé pour savourer son dîner, alla voir le contrôleur pour « savoir s’il pouvait aider à aiguiller le train ».  Un autre passager, pilote de ligne, expliqua que « garer un train est moins périlleux que de poser un 747 ». 

Le contrôleur, débordé par les demandes des passagers, les informa que Sète ne serait pas desservi « pas de quai, pas d’arrêt »… ce qui provoqua un soulèvement en voiture 7… 

Trois, toujours prompte à se rebeller, proposa son aide « pour faire une manif » en voiture 7… la voiture 8, qui servait de messager, approuva la proposition et fournit les feutres (d’un gamin qui hurla à plein poumon devant le vol manifeste de son matériel de création).

A Narbonne, le train fut, de nouveau, stoppé à quai, cette fois, en raison d’« un souci de relève de contrôleurs »… vingt minutes plus tard, alors que tout le monde était descendu sur le quai pour fabriquer une banderole « voyageurs en détresse, pitié, aidez-nous », le chef de gare siffla pour un départ imminent… 

La ruée vers les wagons fut épique, et, bien sûr, dans la bousculade, un petit sac (de feutres) fut oublié sur ledit quai.

Après sept annonces pour « récupérer le sac oublié sinon on doit appeler les démineurs », la révolte, menée par Trois, s’amplifia. Suprême toujours en mode aiguilleur des traintrain, expliqua au chef de gare qu’il ne fallait pas envoyer l’armée, mais plutôt la Légion pour calmer ces « abrutis qui gâchent mon week-end avec ma truite saumonée ». 

Après une récupération à coups de pied au cul, le train repartit (enfin).

A 1 minute de Toulouse, l’hystérie reprit de plus belle. 

Un promeneur (et chasseur de champignons) oeuvrait sur le bas-côté provoquant l’affolement général des conducteurs divers. Un TER (train en retard) avait signalé une « urgence absolue »  en raison d’un « imbécile heureux se prenant pour Tarzan sur les rails » ce qui provoqua l’arrêt du trafic pendant 40mn (supplémentaire, selon la SNCF… 1h selon les passagers) afin de localiser « l’idiot » et de le remettre dans les bois environnants (et éventuellement lui faire bouffer des champignons avariés !).

Après ce nouvel incident, l’Intercité vogua vers sa destination finale au ralenti « pour parer à tous les cons qui pullulent actuellement sur le sol aquitain… » (dixit le contrôleur imitant le Roi Loth(1)).

Pendant ce temps Suprême et Trois avaient rassemblé l’ensemble du wagon pour jouer au cluedo « qui a tué la SNCF ? » et furent rejoints par les autres wagons qui commençaient à se rebeller petit à petit devant l’ampleur du retard « veuillez accepter nos excuses pour ce désagrément ».

A Bordeaux, le train affichait 4h57 de retard (selon les deux parties)…et autant de correspondances loupées…

Le guichet d’accueil fut envahi par des voyageurs énervés, éreintés et passablement vindicatifs, sans compter Trois avec sa pancarte à message choc « Je suis EN TRAIN »… avec le soutien de Suprême qui expliquait comment  gérer une entreprise avec délicatesse, ponctualité et « intelligence relativement limité, comme vos aiguillages ».

Le reste du week-end en amoureux restera à la discrétion des vieux mariés (mais on dit qu’ils ont dormi pour récupérer… oui, les vieux, ça tient moins la route !).

 

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(1) Oui, merci encore M. Astier.

 


Prochain épisode : Trois et Suprême adoptent !

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